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Autour du rock : chroniques, histoire des pochettes et des chansons

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

22 novembre 1968 – The Beatles – The Beatles.

22 novembre 1968 – The Beatles – The Beatles.

The Beatles est le premier album du groupe à ne pas présenter une photo des musiciens. Pire, il ne présente rien : il est blanc. Seuls les Beatles pouvaient se permettre une telle pochette.

Déjà à l’origine de la rencontre entre Peter Blake et les Beatles pour Sgt. Pepper, le galeriste Robert Fraser compte bien réitérer l’expérience d’un rapprochement entre art et musique avec un autre artiste de son écurie pop : Richard Hamilton. Fraser présente au groupe une œuvre que son poulain vient de terminer. Il s’agit d’un collage réalisé à partir de coupures de presse du procès tristement célèbre pour drogues des Stones, dans lequel Fraser a lui-même été impliqué.

Sur Stones, A Strong Sweet Smell of Incense (1967-8) Richard Hamilton élève au rang d’œuvre d’art un sordide fait divers : l’arrestation de Mick Jagger et Robert Fraser pour détention de drogue.

Sur Stones, A Strong Sweet Smell of Incense (1967-8) Richard Hamilton élève au rang d’œuvre d’art un sordide fait divers : l’arrestation de Mick Jagger et Robert Fraser pour détention de drogue.

Très impressionné, McCartney demande à rencontrer Hamilton. Ne pourrait-il pas réaliser une œuvre similaire à partir de photos personnelles des membres du groupe pour leur prochain album ? Bien que pionnier et maître du pop art anglais, Hamilton n’est pas séduit par l’idée. Il ne souhaite pas rajouter aux pochettes criardes à la mode et propose plutôt quelque chose de complètement différent. Il faut être en rupture totale. En pleine ascension conceptuelle, Hamilton sent sans doute qu’il ne peut rivaliser avec la pochette surchargée de Peter Blake. Pour se démarquer, il doit réaliser un anti Sgt. Pepper.

Pourquoi pas dans ce cas une pochette vierge ? Si les Beatles souhaitent leur collage autobiographique, il peut réaliser un poster pour l’insérer dans l’album. Hamilton a tout de même l’idée de placer sur la pochette immaculée la trace d’une tasse de café mais l’idée est trouvée trop désinvolte. Puis il suggère que la pochette soit imprégnée de pulpe de pomme en hommage à Apple, la nouvelle maison de disques crée par le groupe. Trop irréaliste.

Ainsi naît l’album blanc pour lequel Hamilton affirme avoir été payé l'équivalent de seulement $ 316. Le blanc est à la fois couleur et absence de couleurs, espace et plan, vacuité ou plénitude, pureté ou possible. Mais le blanc possède aussi dans nos sociétés une valeur positive. Parions que si Hamilton avait dû plancher sur une pochette des Stones, cette dernière aurait été noire, tout comme la même année le fut presque celle de White Light/White Heat du Velvet underground, ou comme le sera complètement, 20 ans plus tard, celle du Black Album de Prince.

1968 – White Light/White Heat – The Velvet underground

1968 – White Light/White Heat – The Velvet underground

Blanc mais pas seulement

• Le poster

Le poster intérieur répond donc à la première demande du groupe qui souhaitait un collage dans l’esprit de Stones, A Strong Sweet Smell of Incense 67. Pour le réaliser, McCartney confie à Hamilton trois boîtes remplies de photos personnelles. Les membres du groupe y sont présentés dans leur intimité en compagnie de quelques amis ou personnalités comme leur producteur George Martin, le Premier ministre Harold Wilson ou encore Elizabeth Taylor.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

Deux iconographies feront l’objet de censure : un petit dessin de John Lenon qui le représente nu en compagnie de Yoko Ono, et une photo de Paul McCartney sortant de sa douche réalisée chez lui à Cavendih Avenue, dans sa salle de bains. Aussi ridicule que cela puisse paraître, Capitol fait disparaître le gribouillage représentant les poils pubiens de Yoko et le trait de crayon qui simule le pénis de John. Paul a plus de chance. Son sexe est caché par un pilier qui trône au milieu de la pièce. Mais à y regarder de plus près trois poils pubiens dépassent de chaque côté. Sitôt découverts, sitôt supprimés.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

Le groupe ayant pris l’« habitude » (depuis Sgt. Pepper) d’imprimer les paroles de ses chansons, c’est à l’envers du poster qu’on les retrouve.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

• Une pièce unique limitée à 630 00 exemplaires

Mais l’ingéniosité de Hamilton ne s’arrête pas là. Il suggère que chaque pochette soit numérotée donnant ainsi à l’objet de mass market le statut d’une œuvre pop à tirage limité.

Et pour que le blanc de la pochette demeure intact, il décide que le nom du groupe (qui semble aussi donner son titre à l’album) comme le numéro du disque seront gaufrés.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

La numérotation, véritable prouesse technique pour un tirage aussi élevé, ne passe pas la réédition. Pour les versions CD, seule la version remixée pour les 30 ans de l’album voit cette prouesse renouvelée. Cependant, on compte près de 630 000 albums originaux numérotés. Yoko Ono possède le numéro 1. Étonnant non ? Les trois autres Beatles, les numéros 2, 3 et 4. Si l’on considère que les 4 premiers albums numérotés sont hors commerce, le numéro 5 se trouve être le premier du marché. Inutile de dire que ce numéro n’est pas à la portée de toutes les bourses. En novembre 2008, un collectionneur l’achète pour 19 201 livres (24 500 euros).

• Un double album

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

À album double, pochette double. À l’intérieur, à gauche les titres des chansons, à droite les portraits en noir et blanc des Fab Four. Cet album étant constitué de compositions personnelles de chacun des membres, Hamilton choisit de les représenter séparément et non dans une photo de groupe. Les mêmes portraits sont reproduits en couleurs et insérés dans la pochette avec le poster pour le plus grand plaisir des fans qui pourront les exposer.

 

Ces quatre photos couleurs ont été prises par John Kelly au cours de l’automne 1968.
Ces quatre photos couleurs ont été prises par John Kelly au cours de l’automne 1968.
Ces quatre photos couleurs ont été prises par John Kelly au cours de l’automne 1968.
Ces quatre photos couleurs ont été prises par John Kelly au cours de l’automne 1968.

Ces quatre photos couleurs ont été prises par John Kelly au cours de l’automne 1968.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

Enfin, petite particularité technique, les disques sont extraits par le haut (et non par le côté comme dans tous les albums de l’époque) et enveloppés dans des pochettes entièrement noires.

Richard Hamilton (24 février 1922 - 13 septembre 2011) Pionnier du pop art anglais, Richard Hamilton en donne dès le départ sa définition quasi définitive en le qualifiant de « populaire, éphémère, jetable, bon marché, produit en série, jeune, drôle, sexy, séduisant, commercial ». Étroitement associé au Swinging London, notamment grâce à son Galeriste Robert Fraser de la galerie Indica, Richard Hamilton est célèbre pour son collage Just What Is It That Makes Today's Homes So Different, So Appealing? (1956), véritable manifeste du pop art anglais, et aussi bien connu pour ses gravures qui représentent l’arrestation pour détention de drogue de Robert Fraser et Mick Jagger, menottés à l’arrière d’une voiture de police. De 1957 à 1961, Hamilton enseigne l’architecture intérieure et le design au Royal College of Art de Londres, où grandit la jeune génération du pop art londonien. Il a notamment pour élève Peter Blake mais ne partage pas avec lui de goût particulier pour la culture pop ni pour les rêves d’adolescents. Il est également le professeur de Brian Ferry et de Nick de Ville et l’on retrouvera par la suite son influence dans les pochettes de Roxy Music. Bien qu’il soit considéré comme l’un des pères du pop art anglais dont il a réalisé des œuvres majeures, Hamilton est en fait plutôt précurseur de l’art conceptuel comme le montre la pochette de l’Album blanc.
Richard Hamilton (24 février 1922 - 13 septembre 2011) Pionnier du pop art anglais, Richard Hamilton en donne dès le départ sa définition quasi définitive en le qualifiant de « populaire, éphémère, jetable, bon marché, produit en série, jeune, drôle, sexy, séduisant, commercial ». Étroitement associé au Swinging London, notamment grâce à son Galeriste Robert Fraser de la galerie Indica, Richard Hamilton est célèbre pour son collage Just What Is It That Makes Today's Homes So Different, So Appealing? (1956), véritable manifeste du pop art anglais, et aussi bien connu pour ses gravures qui représentent l’arrestation pour détention de drogue de Robert Fraser et Mick Jagger, menottés à l’arrière d’une voiture de police. De 1957 à 1961, Hamilton enseigne l’architecture intérieure et le design au Royal College of Art de Londres, où grandit la jeune génération du pop art londonien. Il a notamment pour élève Peter Blake mais ne partage pas avec lui de goût particulier pour la culture pop ni pour les rêves d’adolescents. Il est également le professeur de Brian Ferry et de Nick de Ville et l’on retrouvera par la suite son influence dans les pochettes de Roxy Music. Bien qu’il soit considéré comme l’un des pères du pop art anglais dont il a réalisé des œuvres majeures, Hamilton est en fait plutôt précurseur de l’art conceptuel comme le montre la pochette de l’Album blanc.
Richard Hamilton (24 février 1922 - 13 septembre 2011) Pionnier du pop art anglais, Richard Hamilton en donne dès le départ sa définition quasi définitive en le qualifiant de « populaire, éphémère, jetable, bon marché, produit en série, jeune, drôle, sexy, séduisant, commercial ». Étroitement associé au Swinging London, notamment grâce à son Galeriste Robert Fraser de la galerie Indica, Richard Hamilton est célèbre pour son collage Just What Is It That Makes Today's Homes So Different, So Appealing? (1956), véritable manifeste du pop art anglais, et aussi bien connu pour ses gravures qui représentent l’arrestation pour détention de drogue de Robert Fraser et Mick Jagger, menottés à l’arrière d’une voiture de police. De 1957 à 1961, Hamilton enseigne l’architecture intérieure et le design au Royal College of Art de Londres, où grandit la jeune génération du pop art londonien. Il a notamment pour élève Peter Blake mais ne partage pas avec lui de goût particulier pour la culture pop ni pour les rêves d’adolescents. Il est également le professeur de Brian Ferry et de Nick de Ville et l’on retrouvera par la suite son influence dans les pochettes de Roxy Music. Bien qu’il soit considéré comme l’un des pères du pop art anglais dont il a réalisé des œuvres majeures, Hamilton est en fait plutôt précurseur de l’art conceptuel comme le montre la pochette de l’Album blanc.

Richard Hamilton (24 février 1922 - 13 septembre 2011) Pionnier du pop art anglais, Richard Hamilton en donne dès le départ sa définition quasi définitive en le qualifiant de « populaire, éphémère, jetable, bon marché, produit en série, jeune, drôle, sexy, séduisant, commercial ». Étroitement associé au Swinging London, notamment grâce à son Galeriste Robert Fraser de la galerie Indica, Richard Hamilton est célèbre pour son collage Just What Is It That Makes Today's Homes So Different, So Appealing? (1956), véritable manifeste du pop art anglais, et aussi bien connu pour ses gravures qui représentent l’arrestation pour détention de drogue de Robert Fraser et Mick Jagger, menottés à l’arrière d’une voiture de police. De 1957 à 1961, Hamilton enseigne l’architecture intérieure et le design au Royal College of Art de Londres, où grandit la jeune génération du pop art londonien. Il a notamment pour élève Peter Blake mais ne partage pas avec lui de goût particulier pour la culture pop ni pour les rêves d’adolescents. Il est également le professeur de Brian Ferry et de Nick de Ville et l’on retrouvera par la suite son influence dans les pochettes de Roxy Music. Bien qu’il soit considéré comme l’un des pères du pop art anglais dont il a réalisé des œuvres majeures, Hamilton est en fait plutôt précurseur de l’art conceptuel comme le montre la pochette de l’Album blanc.

Les autres albums blancs

Bien qu’hyperminimaliste, le graphiste de l’album blanc est assez typé mais pas suffisamment pour éviter les plagiats. Ainsi, on trouvera par la suite d’autres albums blancs comme Dandys Rule OK (1995 ) des Dandy Warhols ou White Album (2000) de Lewis Black.

 

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

• Les albums noirs

Le noir est aussi efficace que le blanc et le carré noir a toujours été à la mode dans le graphisme. C’est donc tout naturellement qu’il trouve sa place sur un album d’autant plus qu’il s’inscrit sciemment ou non en miroir du Blanc des Beatles.

Le plus connu est sans doute celui de Prince qui, à l’instar d’un Malevitch, réaffirme la supériorité du noir sur les autres « couleurs ». Si Prince fait partie de ceux qui assument ce choix au moins de tirer son album The Black Album, il n’est pas le premier, ni ne sera le dernier, à utiliser le monochrome pour illustrer sa musique. En 1971, Kluster un groupe de musique expérimentale allemand sort Klopfzeichen avec un gaufrage sur pochette noire. Tout aussi confidentiel sort en 1977 The Black Album de Boyd Rice. Plus connus sortent en 1980, Back In Black d’AC DC et en 1991, Metallica de Metallica.

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

Aujourd’hui encore, le carré noir n’en finit pas d’inspirer, quel que soit le genre musical. En septembre 2012, le rappeur Lupe Fiasco sort Food and Liquor II: The Great American Rap Album sous une pochette entièrement noire. Dans une interview, il reconnaît avoir voulu lancer un défi à Atlantic Records, sa maison de disques, mais aussi s’être inspiré de l’album Man in Black de Johnny Cash qui dans sa chanson éponyme explique sa signification du noir : « Je porte le noir pour les pauvres et les opprimés, vivant dans les quartiers misérables et sans espoir de la cité ; je le porte pour les prisonniers qui ont depuis longtemps payé pour leur crime ; on les garde enfermés, notre époque en fait des victimes. » L’année suivante, ce sera au tour de Jay-Z de sortir son Black Album

 

Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?
Pourquoi l’album blanc est-il blanc ?

Avec l’album blanc, une chose est sûre, le psychédélisme et le pop art ont complètement disparu des pochettes des Beatles pour laisser place à un art conceptuel hyperminimaliste.

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